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ANLB

Aïn Nouissy / Noisy-les-Bains
Toute l'histoire d'un village d'Algérie

LA TELEVISION

par Norbert Ségalas

Vers la fin de l’Algérie française, entre 1960-62*, nous sommes allés à Oran avec Aimé Vuillaume dans sa « Taunus » (ou Opel… j’ai un doute… depuis le temps…), visiter la grande foire internationale qui allait être la dernière, il fallait toute la journée et même davantage pour prospecter tous les stands.

Ceux qui présentaient des téléviseurs avaient la faveur de Mémé qui discutait longuement avec leurs représentants. C’était les balbutiements de la télévision en Algérie. Au-dessus d’un stand il y avait en réclame une grande photo sur laquelle on voyait la tête souriante de Bourvil, un téléviseur et une légende qui disait : « Bourvil a choisi l’Image Parlante ». Plus tard, quand je passais par Béziers, au milieu de l’avenue Saint-Saëns qui va de la statue de Paul Riquet jusqu’aux arènes, j’ai revu la même affiche en dix fois plus grande au-dessus des ateliers où étaient fabriqués ces téléviseurs. Cette usine de montage appartenait à Bourvil.

A midi nous nous sommes installés au restaurant panoramique. Nous étions à table où il y avait les couverts, le pain et le vin. Comme cela arrive souvent, il nous a fallu patienter longuement. Pour tromper son attente et sa fringale, mon père commença à tremper des morceaux de pain dans son verre de vin (en occitan « faire saussolle »). Un couple était assis à la table voisine et l’homme dit à sa femme : « Je vais faire comme le monsieur… », et joignant le geste à la parole il se mit à faire de même devant sa femme offusquée. La conversation se lia facilement et le mari se présenta : « Maître Kalfon, avocat au barreau d’Oran », en nous remettant sa carte.

Quelque temps après, la maison de Mémé s’ornait d’une grande antenne de télévision.

En 1964, après mon retour au bercail, Aimé nous invita un soir, à venir voir la télévision. Il y avait une émission sur le gouffre de Noisy**, et à un moment donné j’ai vu mon père, au bord du gouffre, qui donnait des explications et des conseils aux jeunes reporters de la télévision algérienne qui allaient filmer les entrailles de l’abîme. Ça alors… mon père qui passe à la télévision algérienne « démocratique et populaire »… je n’en revenais pas.

En effet, quelques mois auparavant, mon père, connaissant l’emplacement du gouffre, avait guidé l’équipe de reportage sur les lieux et avait été filmé par la même occasion.

Le programme suivant était une émission de variétés, Colette Renard terminant son récital à Oran était sortie dans la rue au-devant des journalistes qui l’attendaient. Un jeune reporter, tout frais émoulu, lui tendit le micro en lui posant cette question « très intelligente et importante pour lui » :

-Que pensez-vous de Johnny Hallyday ?

Alors là… la Colette se cabre comme un mustang qui vient de se faire piquer par serpent à sonnette, et toute rage rentrée, elle répond :

-Mais je ne suis pas venue ici pour parler de Johnny Hallyday… j’en ai rien à faire de Johnny Hallyday… je suis venue ici pour chanter mes chansons…

Le jeune interviewer ne savait plus où se mettre devant la chanteuse qui ne cessait de le houspiller. Elle n’a pas fini sa diatribe par : « Quel con ! », comme l’aurait dit Jacky Sardou, mais elle l’a pensé fortement.

Quand j’évoque cette anecdote, j’en ris encore !

Norbert Ségalas

*La dernière foire internationale d’Oran de cette époque commença fin 1960 et se termina début 1961.

**Voire notre chapitre Géographie / Géologie

(Source : Le Lien, bulletin des Enfants de La Stidia et Noisy-les-Bains, n° 60, septembre 2013)

 

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