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20-09-2018

ÉVOCATION, CHEIKH EL DJILLALI BENSEBBANE : LE CHANTRE DU CHANT BÉDOUIN.

Les chantres de chant bédouin, les cheikh Abdelkader Bouras, El Madani, El Khaldi, Abbes, El Heddadji, El Djillali, Remadi, El Mamachi, Abdelmoula, Adda et Ahmed Tiarti et tant d'autres, à une époque relativement récente, avaient fait vibrer les cœurs de foules immenses, et la seule évocation de leur nom était synonyme de respect, d'amabilité, d'autorité, de référence et de disponibilité.

Les chantres de chant bédouin, les cheikh Abdelkader Bouras, El Madani, El Khaldi, Abbes, El Heddadji, El Djillali, Remadi, El Mamachi, Abdelmoula, Adda et Ahmed Tiarti et tant d'autres, à une époque relativement récente, avaient fait vibrer les cœurs de foules immenses, et la seule évocation de leur nom était synonyme de respect, d'amabilité, d'autorité, de référence et de disponibilité.
Arborant l'habit traditionnel, comme un étendard, devant l'autre, dans le but d’affirmer avec force leur identité, ces valeureux maîtres disaient le meilleur du genre melhoun.
Ce verbe poétique qui tire son essence du vécu social, des légendes, des contes populaires, des récits guerriers de l'époque, mais également des couplets d'amoureux et de louanges à la bien-aimée.
Cheikh El Djillali Bensebbane a été cette figure emblématique du genre bédouin oranien qui revendiquait justement, haut et fort, cette personnalité.
A partir de Sayada, cette contrée se situant à quelques enjambées à l'Est de Mostaganem, ce valeureux Cheikh était assis sur le fauteuil de doyen de tous les artistes algériens, durant au moins dix années. II quitte ce monde, à l'âge de 99 ans, le 27 février 2005 en son domicile à Sayada, daïra de Kheireddine (Mostaganem). De son vrai nom Abdelkader Bensebbane, Cheikh El Djillali Bensebbane est né le 16 novembre 1906 à Aïn Nouissy, à une vingtaine de kilomètres au nord-ouest de Mostaganem, au sein d'une famille de modestes travailleurs de la terre. Son père Abdallah et sa mère Yamina Barouda étaient très heureux à sa naissance. Ils l'entourent de toute leur affection, avant de l'inscrire à l'école coranique, comme tous les enfants de son âge. Contraint au travail dès son jeune âge, il rejoint son père dans le but de l'aider à faire rentrer quelques sous pour subvenir aux besoins de sa petite famille. Il s'imprègne de chants bédouins à la faveur des fêtes et cérémonies familiales et religieuses organisées régulièrement autour de chez lui. Il ne se découvre cette passion d'interprète chanteur qu'en 1930, après avoir écouté Cheikh Hamada, qui venait de prendre son envol grâce aux disques 78 tours et la chanson «Lellah ya âoudi biya sir». Le support a fait déjà son apparition dans la région de Mostaganem. Le jeune Abdelkader Bensebbane, dit El Djillali au sein de sa famille d'abord, va tenter d'apprendre des chansons de ses vedettes modèles qui sont les Cheikh Hamada et Abdelkader El Khaldi. Vint ensuite le patrimoine poétique local, constitué surtout de madih (religieux) de Sidi Lakhdar Benkhelouf. Il s'imprègne aussi des autres poètes, ceux-là même qui ont alimenté Cheikh Hamada, Cheikh Dahmane Bouterfa et Ould Ladjel. Il apprendra très vite plusieurs œuvres de poètes populaires, à l'image de Ould Refés, Ahmed Boutbal, Ould El Abadi ou encore Mustapha Benbrahim. Cheikh El Djillali Bensebbane fréquentera les cheikh bédouins à l'occasion de rencontres et fêtes traditionnelles, organisées à Sidi Abed ou Sidi Charef (Relizane). Il ira aussi rendre visite, assez souvent, à Cheikh Abdelkader El Khaldi qu'il a connu au sein du café sahraoui à Mdinajdida à Oran en 1935.
Avec Cheikh Hamada, il avait une relation privilégiée, car, en plus de l'admiration qu'il lui témoignait, c'était de l'amitié, du respect et de la complémentarité qui se dégageaient à chacune de leurs rencontres. Cheikh El Djillali Bensebbane n'a jamais accepté d'enregistrer un quelconque support, disque, ou même radio et télévision durant une grande partie de sa vie. Il fallait attendre l'année 1993, lorsque sur insistance de son ami, Cheikh El Djillali Aïn Tadelès (1930-1995), il finit par accepter d'enregistrer deux concerts pour la télévision à Oran. Il choisit d'interpréter à l'âge de 87 ans les œuvres suivantes : «Ya nès ya elli ma teqraou djaya» du poète Sidi Lakhdar Benkhelouf, «Esta ouè selam alik yal madani zine ennour» du poète Mohamed Belkheir.
Une année plus tard, il est honoré par l'A.P.C de Mostaganem à l'occasion d'une importante rencontre sur la chanson bédouine oranaise. Plusieurs cheikh sont venus lui rendre hommage de son vivant tels que Mohamed Boumerdassi de Boumerdès, Abddelkader El Hedadji d'Alger, Nouna Mekki et Abdelkader Oul Laïd d'Oran, Bendehiba El Bouguirati de Mostaganem. Cheikh El Djillali Bensebbane a participé exclusivement au 1er Festival national des chants populaires, qui a eu lieu à Alger en novembre 1969 (salles Atlas et El Mouggar). Les Cheikh Rabah Mitidji, El Attafi, El Djillali Aïn Tadelès, Mohamed Remadi, Mohamed El Meliani, Abbes El Asnami, El Miloud El Vialari, Abdelkader Ould Laïd, Abdelmoula El Abassi et beaucoup d'autres avaient pris part à cette importante manifestation artistique, pour ce genre de musique et la seule, aussi, dans son histoire. En 1995, c'est la wilaya de Mascara qui le distingue à l'occasion du Festival qu'elle tient habituellement à Cheikh Abdelkader El Khaldi. Devant un public choisi parmi les connaisseurs, Cheikh Djillali Bensebbane avait interprété «Bakhta» pour rendre hommage à son ami et compagnon Cheikh El Khaldi (décédé en 1964). Cheikh El Djillali Bensebbane affectionnait particulièrement quelques poésies célèbres telles que «Berka mnel âdawa», d'El Hadj Menouèr Belfodil, «Ouetni ouetni ya nari», «Lguite ana Khoudète» de Mostefa Benbrahim, «Guendouzi sel melha» de Moharned Belkheir, «Haye nefsi» de Sidi Lakhdar Benkhelouf.
Il faut ajouter à cette liste les quelque deux cent autres œuvres mémorisées entièrement. Il eut plusieurs élèves qui l'ont beaucoup approché comme Cheikh Charef El Mamachi et Mohamed Belahouène. Il faut rappeler également que tous les cheikh dans ce genre ont, de près ou de loin, sollicité ses vastes connaissances. Cheikh El Djillali Bensebbane nous quitte presque centenaire (99 ans) le 27 janvier 2005 à Sayada, laissant le souvenir d'un homme qui a défendu le patrimoine populaire avec tous les moyens qu'il pouvait avoir. Il a été un modèle, par excellence, de disponibilité, de gentillesse et d'amabilité.

Abdelkader Bendameche


 

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