Histoire avant 1848
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ANLB

Aïn Nouissy / Noisy-les-Bains
Toute l'histoire d'un village d'Algérie



 

INSOUCIANCE OU INCONSCIENCE

par Norbert Ségalas

C’était au court de l’année 1961, peut-être début 1962, en pleine agonie de notre cher pays. Nous revenions de Mostaganem, peut-être même du Cinémonde, cette magnifique salle de cinéma ultra-moderne qui passait les plus beaux films avec des appareils de haute technologie sur un écran qui prenait 160° : Le Vision.

Ce jour-là, nous avions emprunté la route Mostaganem-Oran vers La Stidia. A la sortie de Mostaganem à l’aplomb de Mazagran, un barrage militaire comme il y en avait depuis quelque temps. Il y avait une dizaine d’homme et leur chef. Que des Arabes. On nous fait signe de nous arrêter sur le bas-côté1.

Maurice Ségalas2 qui conduisait, range tranquillement la « Frégate ».

Nous sommes cinq dans la voiture, on nous demande de descendre et trois militaires se mettent à la fouiller. L’un d’eux visite le coffre, le second l’avant et le dernier l’arrière.

Celui qui fouillait l’arrière, un jeune maigrichon, embarrassé par le fusil en travers de son dos, essaie de soulever la banquette mais ne peut parvenir à ses fins.

Il se tourne vers Maurice et lui demande : « ça s’enlève pas ? »

Maurice répond : « Non ». L’autre n’insiste pas, et se tournant vers son chef, il dit avec ses copains : « C’est bon. Tout est normal. »

Nous pouvons poursuivre notre chemin…

Un ou deux kilomètres plus loin, Maurice arrête la voiture et nous demande de descendre. Il va vers l’arrière du véhicule, et d’un coup sec, soulève la banquette, et là, bien étalés sur le plancher, apparaissent 4 ou 5 tracs O.A.S..

Il y en a un, d’entre nous, qui dit « Eh ben, on a eu du pot !!! »

Et puis on rigole, l’insouciance de la jeunesse reprenant le dessus.

Quarante ans plus tard, quand je repense à cette histoire, j’en ai toujours froid dans le dos. J’étais le seul à l’époque à avoir plus de 18 ans…

Nos anges gardiens n’avaient pas chômé ce jour-là.

Norbert Ségalas


 

1) NDLR : Dans les mois qui ont précédé l’indépendance, des bandes de rebelles armés arrêtaient les voitures pour contrôler passager et véhicules. De nombreuses fois, malheureusement, ces « contrôles » ne sont pas aussi bien terminés que celui-ci.

2) Maurice Ségalas n’avait pas de permis de conduire, il était trop jeune ! C’est en France qu’il passera son permis.


 

(Source : Bulletin de liaison des Enfants de La Stidia et Noisy, n° 42, mars 2009)



 

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