Histoire avant 1848
Archives / Bibliothèque
Vie des Communautés
Centenaire 1914-1918

ANLB
Aïn Nouissy / Noisy-les-Bains
Toute l'histoire d'un village d'Algérie


LA FAMILLE ANDRAUD

Etude à l’occasion d’un voyage en Auvergne

En souvenir de Mme Eugène Andraud, née Paulette Langlois, à qui je dois une partie des informations de cet article.

Un jour d’environ 1785, Etienne Andraud a épousé Louise, son homonyme, et ils sont venus s’établir à Boudes (63) où ils devaient fonder une longue lignée dont les porteurs du patronyme existent toujours dans les environs.

C’est ainsi que leur naquit Antoine, en 1787, qui s’étant marié à Boudes avec Catherine Abonnat (de Bard) devint le père d’au moins cinq enfants dont deux garçons et trois filles, l’aîné se prénommant forcément… Etienne. Celui-ci s’étant à son tour marié, en 1835, avec Catherine Bernard, de Chalus (63), eut lui aussi cinq enfants et comme à l’époque on donnait le plus souvent aux enfants le prénom de leur parrain ou marraine, il y eut ainsi trois Antoine sur les quatre garçons, l’aîné se prénommant, une fois encore, Etienne.

C’est l’aîné de ces Antoine qui devait devenir le fondateur de la « dynastie » des Andraud de Noisy-les-Bains. Le deuxième frère Antoine, naquit en 1851 et épousa Marie Comptour, de Vichel (63) où il s’établit comme agriculteur ; le troisième Antoine dit Louis Andraud, naquit en 1853 et épousa Marie Sizolle, elle aussi de Vichel où le jeune couple s’installa comme boulanger.

Antoine Andraud l’aîné naquit le 22 octobre 1838 à Boudes (63), d’abord cultivateur de son état, devait se marier en premières noces, le 21 février 1860 à Boudes, une jeune fille de son village, Marie Chassagne, couturière, qui décéda au même lieu le 18 mars 1865 alors qu’Antoine se trouvait à Paris où il exerçait depuis quelque temps la profession de brocanteur. Le couple avait eu un fils, Paul, né le 26 mai 1861 à Boudes, et qui devait malheureusement décéder de maladie le 22 août 1886 à Albertville (73) où il effectuait son service militaire au 78ème régiment d’infanterie.

C’est donc à Paris où, comme beaucoup d’Auvergnats, Antoine avait émigré, qu’il devait faire la connaissance d’une « payse », Marie Mareuge, née le 26 avril 1845 à Collanges, village peu éloigné de Boudes. Ils se marièrent le 21 novembre 1865 à la mairie du 11e arrondissement de Paris, et (Estremoine) Noël naquit de cette union, le 24 décembre 1866 au 6 rue de l’arbalète, domicile de ses parents, brocanteurs, dans le 5e arrondissement.

Par la suite le couple entra comme domestique et cuisinière de la famille Emile Tuffière, négociants parisiens aisés liés au tissage des toiles d’Elbeuf et qui, par héritage, possédaient quelques terres en Algérie. En effet, Mme Tuffière, née Henriette Tressy, était la fille unique de Louis Charles Hippolyte Tressy arrivé à Aïn-Nouissy en 1848 avec sa femme née Aglaé Portal, veuve en premières noces de Louis Regnoult de qui elle avait eu Louis Edouard Regnoult, premier maire d’Aïn-Nouissy, époux de Jenny Langlois. Le couple Tressy venu en algérie avec la jeune Henriette reçut une concession de terres transmises aux Tuffière qui, en 1873 ou 1874, partirent pour l’Algérie suivis de leur personnel. Leur fils Georges Tuffière fut maire éphémère de Noisy-les-Bains, anciennement Aïn-Nouissy, de 1900 à 1901.

Le 16 février 1876, la famille d’Antoine Andraud et Marie Mareuge s’agrandit de Eugène, et en 1883 de Eugénie, mais il est fort probable que d’autres enfants morts en bas âge aient vu le jour entre la naissance de Noël et celle d’Eugène.

En septembre 1880 Antoine Andraud demanda une concession qui lui fut refusée car il possédait déjà cinquante hectares, achetés vers 1876 dans les Dradebs appelés parfois la montagne des Andraud, non loin du village. Défrichant courageusement, cultivant, mettant en valeur sa propriété, Antoine Andraud entreprit de construire sa maison « à l’Auvergnate », élevée de deux étages, en plein bled. Malheureusement, le 2 février 1889, une poutre chutait sur lui au cours de ces travaux, le tuant sur le coup.

Il laissait une veuve de 44 ans secondée par Antoine 22 ans et, dans une moindre mesure, par Eugène 15 ans, pour cultiver les vignes. Mais, une année, la mévente des vins algériens devint dramatique et Marie Andraud fut contrainte d’arroser sa vigne avec le vin de la récolte précédente car la récolte nouvelle arrivait. Elle aida sa famille à survivre grâce à la vente des produits fermiers.

1911 fut, pour Marie Mareuge accompagnée de son fils Noël, l’année d’un voyage au pays que nous détaillerons plus loin.

En 1914, la réquisition des vins pour l’armée amena à apprécier les vins algériens et à les accepter de plus en plus sur le marché national. A partir de ce moment, le commerce se développa et la prospérité commença pour les viticulteurs. En 1922, quelques petites années avant de mourir, la grand-mère Andraud, âgée de 77 ans partagea sa propriété, péniblement conservée, entre ses trois enfants :

  • Noël Andraud, marié le 21 décembre 1893 à Noisy-les-Bains avec Adélaïde Martin, née le 31 janvier 1876 à Oued-Amizour, d’où : Antoine, marié en 1919 à Noisy-les-Bains avec Clotilde Schmitt, de La Stidia, dont postérité1 ; Hortense, dite Tencette, mariée en 1920 à Noisy-les-Bains avec Jacques Dryjard-Desgarniers, dont postérité2 ; Cécile, morte enfant ; Angèle, mariée en 1922 à Noisy-les-Bains avec René Lecigne dont elle divorcera en 1949 à Lyon, dont postérité3, et se remariera vers 1951 à Lyon avec Georges Piaut, sans postérité, et reprendra avec lui la boulangerie de Mlle Elise Cazenave ; Marie-Antoinette, dite Marinette, mariée en 1931 avec Aimé Lamoise, dont postérité adoptive au nom de Andraud4.
  • Eugène Andraud, marié en 1899 avec Hortense Caralp, née le 3 novembre 1878 à Oued-Amizour, d’où : Eugène, marié en 1932 à Noisy-les-Bains avec Paulette Langlois, dont postérité5 ; Maurice, marié en 1925 à La Stidia avec Angèle Schmitt, dont postérité6 ; Edouard, célibataire, sans postérité ; Fernand, mort enfant, sans postérité ; Juliette, célibataire, sans postérité ; André, marié en 1944/1945 à La Stidia avec Camille Theisen, dont postérité7 ; Albert, marié en 1945 à Mazagran avec Rolande Puysservert, dont postérité.
  • Eugénie Andraud, mariée en 1904 avec Toussaint Morin, né le 1er novembre 1878 à Aïn-Nouissy, d’où : Alice Morin, mariée en 1928 à Noisy-les-Bains avec Lucien Tortet, dont postérité8 ; Adrienne Morin, mariée en 1932 à Noisy-les-Bains avec François Arborati, dont postérité9 ; Hélène Morin, mariée en 1931 à Noisy-les-Bains avec Hippolyte Savournin, sans postérité ; Rémy Morin, marié en 1946 à La Stidia avec  Georgette Mauer, dont postérité10.

Il est à noter que Adélaïde Martin épouse de Noël Andraud, et Hortense Caralp épouse de son frère Eugène Andraud, nées toutes deux à Oued-Amizour, étaient demi-sœurs filles de Maria Taboni, et de Joseph Martin pour l’une, et de François Caralp pour l’autre.

Enfin, précisons qu’après l’indépendance de l’Algérie, Edouard et Juliette Andraud, tous deux célibataires sont demeurés à Aïn-Nouissy où, en 1977, il sera le dernier Français à être inhumé dans le cimetière, tandis qu’elle fut alors conduite chez les Petites Sœurs des Pauvres à Oran où elle mourut un peu plus tard.

La famille Andraud n’a pas eu la douleur de perdre l’un des siens lors des deux conflits mondiaux. Cependant on trouve la trace de six porteurs du patronyme ayant ou pas servi sous les drapeaux, dans les registres matricules militaires consultables aux Archives Nationales d’Outre-Mer :

Antoine Andraud, né le 17 octobre 1838 à Boudes, Puy-de-Dôme, domicilié à Aïn-Nouissy, profession de cultivateur. Classe 1858 ; taille 1,62m, cultivateur, n’a pas servi, niveau d’instruction 1, 2, 3, bon pour le service par décision du conseil de révision, affectation infanterie 6’ bataillon, 4e compagnie.

Noël Andraud, né le 24 décembre 1866 à Paris, résidant à Noisy-les-Bains, fils de Antoine Andraud et de Marie Mareuge résidants à Noisy-les-Bains. Classe 1886 ; taille 1,65m, cheveux châtain foncé, yeux gris, nez moyen, bouche moyenne, menton round, visage ovale, niveau d’instruction générale 3. Incorporé au 1er régiment de zouaves le 29 août 1889 comme zouave de 2e classe ; maintenu au corps jusqu’au 29 septembre 1888 pour absence pendant son année de service. Certificat de bonne conduite accordé. A accompli une période d’exercices dans le 2e zouaves du 7 au 31 octobre 1889 et du 21 septembre au 18 octobre 1891. Passé dans l’armée territoriale le 1er novembre 1900.

Eugène Andraud, né le 16 février 1876 à Noisy-les-Bains, profession de cultivateur, fils de feu Antoine Andraud et de Marie Mareuge domiciliés à Noisy-les-Bains. Classe 1896 ; taille 1,63m, cheveux châtain, yeux châtain, front ordinaire, nez moyen, bouche moyenne, menton rond, visage plein. Incorporé au 1er régiment de zouaves le 13 novembre 1897, envoyé dans la disponibilité le 25 octobre 1898, se retire à Noisy-les-Bains, certificat de bonne conduite accordé. A accompli une première période d’exercices au 2e zouaves du 4 mars au 1er avril 1901 ; n’a pas accompli de deuxième période, car dispensé selon l’article 15 de la loi du 15 juillet 1889, comme père de quatre enfants vivants ; passé dans l’armée territoriale le 7 février 1906 comme père de quatre enfants vivants. A accompli une période d’exercices dans le 9e bataillon de zouaves du 27 janvier au 4 février 1909. A reçu un titre de congé illimité le 2 septembre 1919 par le 2e zouaves d’Oran ; se retire à Noisy-les-Bains. Père de six enfants le 12 septembre 1923. N’a pas été mobilisé car maintenu dans ses foyers comme père de six enfants vivants, assimilé à la classe 1887 qui n’a pas été rappelée.

Antoine Joseph Andraud, né le 1er octobre 1894 à Noisy-les-Bains, profession de cultivateur, fils de Noël Andraud et de Adélaïde Martin domiciliés à Noisy-les-Bains. Classe 1914 ; taille 1,61m, cheveux châtain, yeux gris, front haut vertical, nez rectiligne long, visage long. Degré d’instruction 3. Incorporé à compter du 16 septembre 1914, services comptant du 1er septembre 1914, arrivé au corps comme cavalier de 2e classe le 17 septembre 1914. Placé en sursis d’appel jusqu’au 15 juillet 1919 en qualité d’agriculteur à Noisy-les-Bains, par décision du général en chef du 20 avril 1919 ; sursis prolongé jusqu’au 15 août 1919 au même titre par décision de la même autorité du 11 juillet 1919 ; envoyé en congé illimité le 23 octobre 1919 par le 18e escadron du train algérien 8e échelon ; se retire à Noisy-les-Bains. Certificat de bonne conduite accordé. Père de deux enfants le 28 septembre 1923. Affecté au C. M. train 2 par note de service du 24 février 1938. Rappelé à l’activité le 1er septembre 1939, arrivé au centre de mobilisation du train le 2 septembre 1939, placé en … le 10 novembre 1939, se retire à Noisy-les-Bains. Campagnes contre l’Allemagne du 17 septembre 1914 au 1er février 1919, blessé par éclat d’obus au poignet et à la cuisse à Longpont le 28 juillet 1918, médaille commémorative de la Grande Guerre ; campagne contre l’Allemagne en Afrique du Nord du 2 septembre au 10 novembre 1939. A obtenu le certificat de combattant par la préfecture d’Oran, le 7 février 1941. Passage dans la réserve de l’armée active le 1er septembre 1917 ; passage dans l’armée territoriale en septembre 1928 ; passage dans la réserve de l’armée territoriale le 1er octobre 1935 ; date de la libération du service militaire le 1er octobre 1942.

Eugène François Andraud, né le 29 décembre 1899 à Noisy-les-Bains, profession de cultivateur, débitant de boissons, courtier en vins, fils de Eugène Andraud et de Hortense Alexandrine Caralp domiciliés à Noisy-les-Bains. Classe 1919 ; taille 1,55m, cheveux châtains, yeux marron clair, front ordinaire, nez moyen, visage ovale. Incorporé à compter du 18 avril 1918, service comptant du 15 avril 1918, arrivé au corps le 19 avril 1918 comme tirailleur de 2e classe, passé au 2r régiment de tirailleurs algériens le 22 avril 1921, nommé caporal le 25 mars 1919, sergent le 16 février 1920, passé au 18 R.T.A. le 4 novembre 1901. Parti en congé libérable le 18 janvier 1921, dirigé sur le dépôt de transit de Beyrouth le dit jour, RDC le 20 janvier 1921. Renvoyé dans ses foyers en attendant son passage dans la R.A.A.qui aura lieu le 15 avril 1921. Se retire à Noisy-les-Bains (Oran). Certificat de bonne conduite accordé. Passé classe 1915, deux enfants le 7 juillet 1939 ; rappelé à l’activité le 30 août 1939, affecté au 22e zouaves, 5e compagnie, arrivé au corps le 30 août 1939 ; affecté au dépôt de zouaves n°2, arrivé au dépôt le 13 novembre 1939 ; classé service auxiliaire par le C.R. de Mascara du 16 septembre 1939 pour : bronchite en 1928, congestion pulmonaire en 1928 et 1837. Le 10 janvier 1940 affecté à la Cie de guet et d’alarme au 2e groupement de D.A.C. ; passé dans l’administration du 22e R.A.D. ; R.D.C. le dit jour du dépôt de zouaves ; affecté au dépôt agricole d’Oran (dépôt de zouaves n° 2) le 18 mars 1940 ; envoyé en congé illimité le 23 juillet 1940 par le dépôt d’artillerie n° 2 à Oran ; déclare se retirer à Noisy-les-Bains. Résumé : Campagne contre l’Allemagne en Algérie du 18 avril 1918 au 23 octobre 1919 ; en Orient du 19 avril 1920 au 18 janvier 1920 ; contre l’Allemagne en Algérie du 2 septembre 1939 au 18 mars 1940.

Maurice Noël Andraud, né le 1er juillet 1901 à Noisy-les-Bains, résidant à Noisy-les-Bains, profession de cultivateur, fils de Eugène Andraud et de Hortense Caralp domiciliés à Noisy-les-Bains. Classe 1921 ; taille 1,64m, cheveux blonds, yeux marron, front ordinaire, nez moyen, visage ovale. A obtenu le C.P.S. session du 20 janvier 1921 au 24 février 1921 ; arrivé au corps comme spahi de 2e classe le 11 avril 1921 ; passé au 5e régiment de chasseurs d’Afrique le 14 octobre 1921 ; passage au 9e régiment de zouaves le 20 janvier 1923, passage annulé par suite d’erreur d’homonymie ; passé dans la disponibilité le 1er avril 1923 ; maintenu provisoirement sous les drapeaux par application de l’article 33 de la loi du 21 mars 1905 ; renvoyé dans ses foyers le 30 mai 1923 ; se retire à Noisy-les-Bains ; certificat de bonne conduite accordé. Père d’un enfant le 2 janvier 1926. Affecté au centre de mobilisation d’infanterie d’Afrique n° 2, annexe de Mostaganem ; éclaireur monté le 10 décembre 1929 ; affecté au C.M. cavalerie n° 2. Rattaché classe 1917, père de deux enfants le 30 janvier 1940. Classé affecté spécial jusqu’au 1er septembre 1940 au titre de la défense des centres de colonisation comme viticulteur, par décision du Gouverneur Général de l’Algérie du 23 mai 1940 ; renvoyé dans ses foyers le 23 juillet 1940 ; se retire à Georges-Clémenceau. Renvoyé dans ses foyers en congé illimité le 25 juillet 1940 par le bureau de recrutement d’Oran.

§§§

Mais revenons un peu en arrière, en 1911. En effet, grâce à une correspondance de huit cartes postales envoyées de Noisy-les-Bains par Marie Mareuge et sa belle-fille Adélaïde Martin, entre le 18 juillet et le 22 septembre plus deux cartes non datées, et retrouvées récemment coup sur coup chez deux brocanteurs de Seine-Maritime, nous apprenons que Marie Mareuge et son fils Noël se sont rendus chez la sœur de celle-ci en Auvergne. Outre l’intérêt familial de cette correspondance, son autre intérêt est l’ensemble des vues de Noisy-les-Bains qu’elle offre.

Ci-dessous, les portraits de Marie Mareuge et de son fils Noël Andraud qui ont fait le voyage en Auvergne, et celui de Adélaïde Martin épouse de Noël Andraud, rédactice avec sa belle-mère de la correspondance envoyée de Noisy-les-Bains à la famille en Auvergne. Dans les textes retranscrits, l’orthographe et le style d’origine ont été soigneusement conservés.


Marie Mareuge
(°1845 à Boudes - + circa 1925 à Noisy-les-Bains)
épouse de Antoine Andraud


Adélaïde Martin
(° 1876 à Oued-Amizour - + circa 1935 à Noisy-les-Bains)
épouse de Noël Andraud, ci-dessous


Noël Andraud
(°1866 à Paris - + 1948 à Noisy-les-Bains)
époux de Adélaïde Martin, ci-dessus.

§§§

LE VOYAGE EN AUVERGNE

Invitation au voyage, la gare de « Noisy – La Stidia » construite en 1908 lors de la mise en service de la voie étroite de 1,055 mètre du chemin de fer de Mostaganem à La Macta rendit les déplacements vers Oran, Mostaganem ou d’autres agglomérations plus aisés et plus rapides. Le bâtiment a été détruit vers 1970 et la ligne supprimée dans les années 2000 puis remise en service en 2017. Sur cette vue, le train est à quai en direction de Mostaganem.

Noisy les-Bains le 18 juillet 1911 / Ma chère sœur / Nous partons lundi le 24 nous prenons / la mégerda à midi et nous arriverons à / port vendres à 10 heures du soir de là je / t’enverrai une dépêche pour que tu / viennes nous prendre au Breuil bonne / santé à tous en attendant le plaisir / de se voir embrasse bien tes enfants et / petits enfants qu’il me tarde de voir / ta sœur qui embrasse de tout cœur / Vve Andraud

Hugues Mareuge père de Marie, eut deux autres filles prénommées elles aussi Marie, issues d’un second mariage. C’est à l’une d’elles, Mme Antoine Boudon, que Mme Andraud adresse cette carte. La traversée de la Méditerranée se fera, d’Oran à Port-Vendres, sur la Medjerda. Mme Andraud demande à sa sœur de la faire prendre (à la gare) du Breuil-sur-Couze situé à une dizaine de kilomètres de Boudes. Marie Mareuge était, en 1911 et ce depuis 1889, la seule veuve Andraud à Noisy-les-Bains.

§§§

La Medjerda navire sur lequel Mme veuve Andraud et son fils Noël ont effectué la traversée d’Oran à Port-Vendres. Cette carte ne fait pas partie de la correspondance.

§§§

Après avoir été logés au centre du village lors de la création de la brigade en 1856, dans une maison qui deviendra ensuite la maison Andraud en face du monument aux mort, la nouvelle caserne ci-dessus fut construite en 1892 à la sortie du village en direction de Mostaganem.

Noisy les-Bains 2 août 1911 / Chers cousin et cousine et tante / Je reçois votre aimable lettre qui m’annonce / la grande joie je le comprend combien vous / avez du les voir à leur arrivée c’était franchement / une grande surprise pour toute la famille / d’après votre lettre je vois que vous êtes / encore en train de moissonner et nous à cette / heure nous attendons la vendange que l’on / voit mûrir le raisin à grand train vous / direz dans votre prochaine si vous êtes content / des souvenirs de l’algérie Embrassez bien votre mari / et vos enfants sans oublier la tante / Adélaïde

La rédactrice de cette carte est Adélaïde Martin épouse de Noël Andraud. Elle accuse réception d’un courrier d’Auvergne l’informant que sa belle-mère et son mari sont bien arrivés dans la famille. Comme dans toutes les familles paysannes on s’informe des travaux de la terre, les moissons en Auvergne et les vendanges en Algérie. On notera qu’Adélaïde s’étonne que dans le courrier qu’elle a reçu il n’ait pas été fait allusion aux cadeaux qu’elle avait envoyés.

§§§

 

Le centre de Noisy-les-Bains orné de la tour de l’horloge érigée en 1872. Le petit dôme qui la coiffe a été remplacé par une petite terrasse en 1960 lors du réaménagement des lieux. Au pied de la tour on distingue l’abreuvoir municipal où l’on conduisait le bétail s’abreuver, principalement les chevaux comme celui que l’on voit ici. Le sol autour de l’abreuvoir était pavé. A droite, la petite grille servait de clôture à la place publique. En 1960, l’espace séparant la tour de la place sera légèrement surélevé et transformé en jardin publique avec bassin et pergola. Au fond à droite on aperçoit la mairie construite en 1881. Elle était entourée d’un jardin qualifié alors de jardin public où sera érigé le monument aux morts de la guerre 14-18, derrière le chariot que l’on voit à gauche de la tour. On remarquera les grands arbres plantés cinquante ans auparavant lors de la création du village et qui en faisait une véritable petite oasis de fraîcheur appréciée des voyageurs ; ils seront malheureusement coupés progressivement et non remplacés pour la plupart d’entre eux. A gauche, les premiers arbres de la rue aboutissant à la route de La Stidia et que l’on verra en sens contraire sur la carte suivante.

Noisy les Bains 13 Août 1911 / Cher cousin et cousine / Je réponds avec un grand plaisir à votre lettre / et vous faisant savoir que nous sommes en / bonne santé et je suis heureuse d’en savoir aussi / des votres je vois que vous êtes content d’avoir de la famil / le auprès de vous mais vous ne dites pas quand / vous aller venir nous voir embrasse bien vos / enfants et cousin ainsi que la tante pour moi / mes enfants vous embrasse de tout cœur / Votre cousine Adélaïde

Adélaïde Martin accuse réception d’un deuxième courrier reçut d’Auvergne apportant des nouvelles des voyageurs et de la famille qui semble apprécier leur présence. Elle regrette un peu que la famille ne prévoit pas de voyage en Algérie.

§§§

 

Voici une vue très rare montrant la « route de la gare » (dénommée ainsi depuis 1908). Elle est prise en direction du centre du village en venant de La Stidia et l’on aperçoit au loin la pente de la Chegga. On remarquera l’activité avec le trafic de plusieurs voitures et à droite cinq hommes portant de grands tabliers devant la forge « H. THURIN », comme indiqué au-dessus de la voiture stationnée sur le trottoir. Il s’agit de Henri Thurin (1877-1929, marié avec Marie Moullin-Traffort), deuxième à partir de la gauche, avec ses ouvriers. Devant les forgerons, une charrue repose sur son soc. Les grands arbres ont été plantés un demi-siècle auparavant et seront arrachés quelques années plus tard pour être remplacés par les ficus que nous avons connus et qui sont toujours en place, un siècle après leur plantation.

 

Noisy les-Bains 22 août 1911 / Cher tante Cousin et Cousine / Je vous remercie beaucoup du grand accueil / que vous avez fait à Noël et à grand-mère d’après / leur avoir vu leur bonne figure j’ai vu qu’ils / ont été soignés les beaux cadeaux que vous m’avez / envoyés sont magnifiques et les enfants sont Inchanté / je vous remercie mille fois embrassez bien la tante / le cousin et les enfants. toute ma famille se joins / à moi pour vous embrassez de tout cœur / Votre cousine Adélaïde

Mme veuve Andraud et son fils Noël sont de retour à Noisy et Adélaïde, épouse de Noël, en informe la famille auvergnate qui les a si bien reçus à en juger par « leur bonne figure » (bonne mine). La famille de Noisy est « inchanté » des cadeaux reçus. Cet « inchanté » pour enchanté trahit certainement la prononciation d’adélaïde, et c’est assez touchant de découvrir ce détail.

§§§

 

Nous sommes ici au centre du village dans la direction de Mostaganem. Au premier plan à gauche l’HÔTEL DE L’HABRA, fameux avant la construction de la voie ferrée, c’était une halte obligée des diligences effectuant le trajet de Mostaganem à Perrégaux et retour. Sur le pas de la porte se tient Mme Torrès, la propriétaire de l’époque et devant elle un indigène que l’on distingue à son sarouel. L’hôtel de l’Habra, propriété de Victor Pain (également propriétaire de la maison d'un étage située en face) en 1900, deviendra la boulangerie Cazenave, reprise dans les années 1950 par Angèle Andraud et son second mari Georges Piaut. Sur le même trottoir, la maison blanche au fond était déjà la maison d’Eugène Andraud après avoir été la première gendarmerie. On voit la diligence pour Perrégaux stationner devant cette maison. Plus loin, on aperçoit les arbres du jardin public de la mairie, et, en face sur le côté droit de la rue les grilles de la place publique. Un peu plus près, deux hommes sont assis sur le bord de l’abreuvoir dont on distingue la tour et son horloge à hauteur des toits.

 

Noisy les-Bains 17 7bre 1911 / Chers tante cousins et cousines / Je vous fais savoir en toute hâte que nous / sommes en bonne santé que ma lettre vous / trouve toujours de même nous avons un très / beau temps et il ne fait pas trop chaud Embrassez / bien la tante cousins et cousines / Votre cousine et cousin Noel / Adélaïde

Par cette carte datée du 17 septembre 1911, Adélaïde entretient les bonnes relations épistolaires avec la famille en Auvergne. Nous apprenons qu’en ce mois de septembre « il ne fait pas trop » à Noisy-les-Bains. Sans doute a-t-elle signé pour son mari.

§§§

 

La mairie construite en 1881 entourée des grilles qui resteront en place jusqu’à la construction de la mairie inaugurée en 1961. La grille sera alors enlevée mais le muret subsiste encore de nos jours avec quelques transformations. On remarquera les grands arbres et particulièrement l’énorme tronc de celui qui se trouve complètement à droite. Quelques habitants sur cette vue, en particulier le petit homme rond, dont j’ai perdu le nom, portant un pantalon noir et levant les bras s’est donné la mort par pendaison. A noter également l’indigène en tenue traditionnelle, appuyé de la main droite sur un grand bâton ; il porte une gandoura blanche sous un burnous clair à grande capuche et coiffé d’un chèche blanc dont un pan passe sous le menton.

 

Noisy les-Bains 22 septembre 1911 / Ma chère sœur neveu et nièce / Je profite de la lettre d’Adélaïde pour / vous faire savoir que nous sommes toujours / en bonne santé et pour vous en souhaiter de même / les pommes étaient délicieuses et je vous en / remercie beaucoup Chère sœur embrasse bien / tes enfants et petits enfants pour moi / Ta sœur pour la vie / Vve Andraud

Marie Mareuge profite de la carte que sa belle-fille envoie à la famille d’Auvergne pour adresser quelques mots à sa sœur Mme Antoine Boudon et la remercier des pommes délicieuses rapportées de son voyage, signant « Ta sœur pour la vie » Se sont-elles revues ? C’est peu probable, rendant cette formule d’autant plus émouvante.

§§§

 

Cette rue, dénommée ici « rue des jardins », se situait dans le prolongement de la rue de l’église. Au premier plan à droite se trouve une maison de colonisation sans trottoir, contrairement aux autres maisons de la rue dont on voit qu’elles ont été embellies. Les maisons de colonisations, habitations des premiers colons de 1848, étaient encore nombreuses en 1911 à Noisy-les-Bains. Un peu plus haut dans la rue, une femme se tient devant sa porte, sans doute sortie au passage du colporteur debout au milieu de la chaussée et portant une sorte de grand plateau soutenu par une bretelle. L’arbre dont on voit le feuillage sur le côté gauche de la rue poussait contre l’épicerie Lamoise, beaucoup plus tard pharmacie Decorie et toujours pharmacie de nos jours. Les arbres du côté droit sont ceux du jardin public de la mairie, puis ceux de la place publique et de l’allée conduisant à l’église de 1848. Dans le fond s’élève le dôme de la Chegga.

 

Ma chère tante / Recevez ma tante les meilleurs /souvenirs de votre nièce / Adélaïde

Carte malheureusement non datée mais vraisemblablement de la même période, adressée par Adélaïde Andraud à la tante Boudon en Auvergne.

§§§

 

Cette vue a été commentée plus haut.

 

Ma chere cousin et cousin / Recevez mes chers parents les / meilleurs amitiées de votre Cousine / Adélaïde

Carte malheureusement non datée mais vraisemblablement de la même période, adressée par Adélaïde Andraud aux enfants de la tante Boudon en Auvergne. Ces deux dernières cartes ont probablement été envoyées par le même courrier.

Nota : Souvent les cartes postales de Noisy-les-Bains un peu postérieures à cette époque portent en bas la mention : Editeur, Vve Lamoise, ou J. Morin, éditeur. Il s’agit des noms des commerçants qui vendaient ces cartes. En l’occurrence, la veuve Lamoise était Eugénie Morin (1868-1931) veuve de Eugène Lamoise (1864-1917), et J. Morin était Jean Morin (1873-1945), son frère, tous deux tenant commerces d’épiceries locales.

Gérard Langlois

(Sources : Une étude de Michel Colas intitulée « Du Lembron à L’Algérie française, ils s’appelaient Andraud, ils étaient Auvergnats » publiée en 2004 ; documentation et collections Gérard Langlois ; registres matricules militaires consultables aux Archives Nationales d’Outre-Mer)

1)-Irène Andraud épouse Gabriel Feldis, d’où Danielle Feldis et Victor Feldis ; Norbert Andraud époux de Hélène Rebattel, d’où Gérard Andraud, Christine Andraud, Irène Andraud épouse de Georges Morin de Noisy-les-Bains.

2)-Roger Dryjard-Desgarniers épouse Linette Albertelli, d’où Yannick et Hervé Dryjard-Dégarniers par adoption ; Gilbert Dryjard-Desgarniers épouse Marguerite Finalteri, Henri, Michel et Marie-Jeanne Dryjard-Desgarniers ; Antoine Dryjard-Desgarniers mort enfant ; André Dryjard-Desgarniers mort enfant ; Jacqueline Dryjard-Desgarniers épouse Paul Agniel, d’où Martine, Brigitte, Maryline, Catherine et Véronique agniel.

3)-Yvan Lecigne marié deux fois, dont Danielle Lecigne.

4)-Marie-Hélène Gros-Armengol.

5)-Fernand Andraud épouse Anne-Marie Rasse, d’où Christophe Andraud ; Camille Andraud épouse Roger Pietri, d’où Laetitzia, Jérôme et Laurent Pietri.

6)-Yves andraud épouse Louise Dubois, d’où Georges Andraud ; Maurice Andraud épouse Germaine Duplan, d’où Patrice, Hervé et Laurence Andraud.

7)-Jacqueline Andraud épouse Claude Séguy, d’où Agnès et Nicolas Séguy ; Odette Andraud épouse André Lassalvie, d’où Anna Lassalvie.

8)-Claude Tortet épouse Lucette Albertelli et Andrée Tortet épouse Raymond Font.

9)-François et Rémy Arborati 

10)-Rémy Morin épouse Georgette Mauer, d’où Lydia, Richard et Eric Morin.


 

© Copyright 2018 G. LANGLOIS/site ANLB