Histoire avant 1848
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Centenaire 1914-1918

MEL 18/01/2015

ANLB
Aïn Nouissy / Noisy-les-Bains
Toute l'histoire d'un village d'Algérie

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GENERAL DE DIVISION CAMILLE MORIN

1900 - 1991

Comme nous le montre le tableau ci-dessous, l'ascendance paternelle de Camille Morin plongeait ses racines dans le Dauphiné (Drôme) et le Rouergue (Aveyron) ; du côté maternelle c'était l'Ile-de-France.

Un peu à l'est de Valence, Antoine Morin, le plus lointain ancêtre, est né vers 1540 à Saint-Vincent la Commanderie, près de Charpey où la famille vécut tout au long du XVIIe siècle. Puis en 1710, à l'occasion du mariage de Claude Morin, cette branche se fixa pour deux générations à Allex, trente kilomètres au sud, avant d'aller vivre à Upie, puis à La Roche-sur-Grâne tremplin vers l'Algérie en 1851 à Aïn-Nouissy. Dans ce Dauphiné, les ancêtres catholiques côtoient les ancêtres protestants, de même que derrière tous les paysans des générations les plus proches se cachent des ancêtres illustres comme le célèbre et sanguinaire baron des Adrets, le chevalier Bayard, Jean Parisot de La Valette ou encore Clément V le premier pape d'Avignon qui laissa le roi de France brûler Jacques de Molay...
Quant aux ancêtres Rouergats de l'ascendance paternelle, d'où que l'on se tourne on les trouve enracinés dans leur pauvreté de leurs pâturages tout au long des XVIIe et XVIIIe siècles.

Avec l'ascendance maternelle, on est ouvrier à Montrouge près de Paris, plus précisément lithographe pour l'ancêtre Julien qui partit avec sa famille pour l'Algérie en 1848 avec le 15e convoi et se fixa à Aboukir.

Comme on le voit, aucune tradition familiale ne prédisposait Camille Morin à atteindre les étoiles de général de division, à l'exception de son grand-père Casimir Morin qui était allé faire la guerre en Crimée sous le Second Empire comme simple soldat, en avait rapporté une médaille, et lui racontait ses souvenirs.

SES HUIT QUARTIERS GENEALOGIQUES

Personne Date naissance Lieu naissance Date décès Lieu décès
GENERATION 1
1 Camille Casimir MORIN 22/02/1900 Aboukir, Algérie 23/09/1991 Libourne (33)
GENERATION 2
2 Jean Victor MORIN 05/08/1873 Aïn-Nouissy 29/11/1945 Oran
X 11/12/1899 à Aboukir, Algérie
3 Adrienne Phanie JULIEN 15/02/1880 Aboukir, Algérie ../03/1969 France
GENERATION 3
4 Charles Casimir Adrien MORIN 07/02/1836 Roche-sur-Grâne, Drôme 20/02/1924 Noisy-les-Bains
X 06/09/1864 à Tounin, Algérie
5 Marie Victorine BERNARD 08/11/1843 La Cavalerie, Aveyron 15/08/1914 Noisy-les-Bains
6 Eugène JULIEN 09/05/1854 Mostaganem, Algérie 04/04/1893 Aboukir
X 24/02/1876 à Aboukir, Algérie
7 Léonie Marie Henriette COLOMBET 08/06/1858 Aïn-Sidi-Chérif, Algérie
GENERATION 4
8 Auguste Joseph MORIN 22/02/1813 Allex, Drôme 16/02/1866 Aïn-Nouissy
X 1830 à La Roche-sur-Grâne, Drôme - Famille arrivée à Aïn-Nouissy en 1851
9 Christine Désirée RICHAUD 03/10/1808 Roche-sur-Grâne, Drôme 09/07/1885 Aïn-Nouissy
10 Maurice BERNARD 13/03/1805 La Cavalerie, Aveyron Algérie ?
X La Cavalerie, Aveyron
11 Marie COMBY 12/06/1816 La Cavalerie, Aveyron Algérie ?
12 Jacques Alphonse JULIEN 17/04/1807 Paris, Seine 27/12/1877
X 04/10/1831 à Paris, Seine - Famille arrivée à Aboukir avec le 15e convoi de 1848
13 Louise Geneviève ASTIER circa 1812/1815 19/03/1885 Aboukir
14 Jean Pierre COLOMBET
X
15 Marie Thérèse Augustine FAULTE du PUYPARLIER circa 1838

* * *

Le Général de Division Camille MORIN (GO-GCME)

Le général de division Camille MORIN est né le 26 février 1900 à Aboukir, fils de Jean Morin, agriculteur à Noisy-les-Bains et de Adrienne Julien appartenant à une famille arrivée à Aboukir en 1848.

Incorporé dans l'Artillerie le 18 mars 1920, il est promu sous-lieutenant de réserve le 1er octobre de la même année. Rengagé au titre du 34e R.A.C., il est promu sous-lieutenant d'active le 1er octobre 1923 à sa sortie de l'Ecole Militaire de l'Artillerie. A l’issue d'un stage à l'Ecole d'Application de l'Artillerie, il est affecté le 2 septembre 1924 au 2e Groupe d'Artillerie de campagne d'Afrique. Avec sa batterie, il participe en 1925 à la campagne du Rif et à de nombreux combats au Maroc au cours desquels sa conduite lui vaut deux élogieuses citations et l'attribution de la Croix de Guerre des T.O.E.

Il entre en Gendarmerie comme lieutenant en 1927, et, après avoir suivi les cours à l'Ecole d'Application de Versailles, il commande les sections de Bougie et de Mascara. Promu capitaine en 1933, il est détaché à l’état-major de la 5e Région Aérienne en 1937. A la mobilisation, le 2 septembre 1939, il prend le commandement de la Prévôté de cette grande unité. Le 1er juillet 1940, il est affecté à l'état-major du Commandement Supérieur de l'Air en A.F.N. et promu chef d’escadron le 26 juin 1941. Lieutenant colonel en 1944, il organise la Légion de Gendarmerie de l'Air dont il prend le commandement. Colonel le 25 mars 1945, il est réaffecté à la Gendarmerie Nationale en 1947 lors de la fusion des Gendarmeries des Armées de Terre, de Mer et de l'Air. Il commande la 1ère Légion Ter de la Garde Républicaine à Paris jusqu'au 8 octobre 1948 date à laquelle il prend la tête de la 10e Légion de Gendarmerie qui couvrait alors toute l'Algérie et le Sahara.

Promu général de brigade le 28 décembre 1951, puis général de division le 1er août 1957, il restera à la tête des forces de gendarmerie jusqu'en avril 1961 (neuf ans de commandement régional, dont six ans en période de guerre). Entre la date de son départ et la fin de la guerre, ce sont quatre généraux qui se succéderont dans ce poste en vingt mois.

Il y vivra l'une des périodes les plus difficiles de sa carrière, c'est-à-dire pendant les opérations de maintien de l'ordre et de pacification. Devant les affrontements impitoyables de la communauté française et de la communauté musulmane, il a le souci constant d'apaiser les haines et de préserver les intérêts matériels et moraux des plus modestes, quelle que soit leur confession.

D’une foi inébranlable et d'une volonté exemplaire, il a toujours suivi l'idéal militaire qu'il s'était forgé dans l'abnégation et dans sa vocation pour les grandes causes humanitaires.

A la fois homme de cœur et homme d'action, il est très conscient des risques d'escalade de la violence au sein du drame algérien et donne des directives très précises à ses subordonnés dès 1957 :

« Je vous rappelle le devoir fait à tous d'agir selon les principes traditionnels de la Gendarmerie dans le cadre légal et réglementaire et que vous devez accorder le plus grand prix au strict respect de la personne humaine.
Tout interrogatoire doit se dérouler sans menace ni violence, et dans des conditions en tous points dignes de représentants de la loi.
S'égarer à avilir un suspect, un prisonnier ou un inculpé, c'est s'avilir soi-même, en même temps que porter atteinte à l'honneur de l'Arme.
Le Gendarme par son sens du devoir doit témoigner en toutes occasions d'une parfaite discipline et d'une exacte maîtrise de soi.
 »

Ainsi s'exprimait l'homme de bien qui a fait l'admiration de ses hommes pour le courage qu'il a toujours manifesté dans la défense des droits de l'homme.

Décédé le 23 septembre 1991 à Libourne, il était Grand Croix dans l'Ordre National du Mérite (seul gendarme, à cette date, à avoir reçu cette distinction), Grand Officier de la Légion d'Honneur et titulaire de la Croix de Guerre des T.O.E., le Général MORIN s'était vu décerner, en outre, de nombreuses décorations françaises et étrangères.

CITATION A L'ODRE DE L'ARMEE

« A la tête de la Gendarmerie Nationale en 10e Région Militaire, le Général MORIN s'est trouvé aux prises avec les difficultés résultant de la rébellion algérienne dès l'origine de celle-ci, le 1er novembre 1954.

Grâce à son sens de l'organisation et sa grande connaissance des problèmes particuliers de l'Algérie, il a su adapter au mieux les moyens de son Arme aux nécessités de l'heure, cherchant constamment à accentuer notre emprise sur la population. Sous son impulsion, la Gendarmerie s'est confirmée comme étant l'une des pièces maîtresses dans le dispositif de la pacification.

Très actif, sillonnant en tous sens l'Algérie et le Sahara, il est allé jusque dans les brigades les plus éloignées pour animer et coordonner les efforts de ses subordonnés, pour orienter également les recherches des renseignements de toute nature. Cette activité incessante lui a permis, en dépit de risques certains, de recueillir directement de nombreux éléments de ses synthèses, lucides et complètes, qui ont constitué pour le Commandement un instrument d'une qualité exceptionnelle.

Depuis la fin de l'année 1958, il s'est attaché tout particulièrement à la mise sur pied de commando de gendarmerie, dont il a fait des unités disciplinées et ardentes, apte à prolonger l'action des brigades et des formations opérationnelles.

Dans tous les domaines de son commandement, le Général MORIN a fait preuve de réalisme et d'opiniâtreté pour le plus grand profit de l'Algérie. »

Signé : Pierre GUILLAUMAT
Ministre de la Défense (1960)

 

* * *

Nous complétons cette biographie par des articles que la presse d’Algérie consacra à Camille Morin, puis à l’officier.
Ils sont extraits de La Gazette de Noisy-les-Bains, tomes 2 à 5.

3 mars 1900
Aboukir - Nos meilleurs compliments à M. et Mme Morin-Julien, les heureux parents d'un superbe bébé qui a reçu les prénoms de Camille Casimir et auquel nous souhaitons longue vie et prospérité.

21 juin 1912
Deux élèves de notre dévoué instituteur, M. Veinière, ont été admis au certificat primaire. Ce sont MM. Adolphe Hernandez et Camille Morin. Nos félicitations.

18 septembre 1931
Noisy-les-Bains – Arrivée : Mme et M. Camille Morin, lieutenant de gendarmerie à Bougie, en congé parmi nous depuis quelques jours. Nos meilleurs souhaits de bienvenue et d'heureux séjour.

19 décembre 1932
Aux arrivés - M. Camille Morin, lieutenant de gendarmerie, est en congé parmi nous pour quelques jours. Nous lui adressons nos meilleurs souhaits de bienvenue et d'heureux séjour.

3 mai 1951
La nomination du colonel Morin - Le colonel Camille Morin, succédant au général Gauduchon, récemment nommé inspecteur général de la gendarmerie à Paris, vient d'être nommé commandant des forces de gendarmerie nationale à Alger.

Bien connu des Oranais, le colonel Morin est un brillant officier qui a fait presque toute sa carrière en Algérie.

Nous lui exprimons nos plus vives félicitations.

22 décembre 1951
Le colonel Morin commandant la gendarmerie en Algérie promu général de brigade.

Nous avons annoncé, mercredi, la promotion de M. le colonel de gendarmerie Morin au grade de général. Nous sommes heureux de rappeler que le nouveau promu, dont la famille paternelle est originaire de Noisy-les-Bains, est né à Aboukir (Oran) en 1900. I1 a fait ses premiers pas dans la carrière militaire en Oranie, au 2e groupe d'artillerie de campagne d'Afrique.

Vite distingué par ses chefs, qui le poussent vers 1'Ecole de Fontainebleau, il est promu sous-lieutenant d'active en 1923. Aussitôt, il part au Maroc, participe à la campagne du Rif en 1925-1926, est cité plusieurs fois. Il entre dans la gendarmerie en 1928. En 1937, il est détaché à l'état-major de la 5e région aérienne à Alger jusqu'en 1943, date à laquelle il prend le commandement de la gendarmerie de l'air, dont il est l'artisan.

A la Libération, il remplit d’importantes fonctions au Ministère de l'Air. Il assure ensuite le commandement de la 10e légion de gendarmerie à Alger, puis succède au général Gauduchon à la tête de la gendarmerie et de la garde républicaine en Algérie.

Il est officier de la Légion d’honneur depuis 1948.

Arabisant distingué, très au courant de toutes les questions d'Afrique du Nord, il était spécialement apte à diriger l'action nécessaire et bienfaisante de la gendarmerie en Algérie, et les nombreux amis qu'il possède en ce pays se réjouissent de voir ainsi récompensés les mérites de cet Africain, de naissance, de cœur et de carrière.

22 février 1952
Noisy-les-Bains - Hôte de marque - A l'occasion d'une visite dans sa famille, la municipalité a été heureuse et fière de recevoir dimanche dernier, dans la coquette salle des délibérations, le général Morin, commandant de la gendarmerie de l’Afrique du Nord.

Un apéritif d'honneur, organisé avec goût, fut offert au général. Morin qui, en termes émus, remercia toute la municipalité, en particulier le maire et le doyen d'âge des conseillers municipaux, ainsi qu'un groupe d'amis qui s'était joint à eux pour cette manifestation intime.

Bien que natif d'Aboukir, c'est à Noisy-les-Bains que le général Morin fit ses premières études. Sa carrière fait honneur à son courage à son labeur. Engagé à 18 ans, il est à 25 ans lieutenant d'artillerie. Passant bientôt dans la gendarmerie, il sort numéro 2 de l'école de Fontainebleau. Depuis, il n'a cessé de parcourir rapidement tous les grades jusqu'aux étoiles qui sont la considération de son mérite et de l'estime dont il est entouré dans tous les milieux.

15 février 1955
Le général Morin commandeur de la Légion d'honneur - C'est avec le plus vif plaisir que nous avons appris la promotion au grade de commandeur de la Légion d’honneur du général Morin, commandant les forces de gendarmerie de la Xe région militaire.

Le général Morin n'est pas un inconnu pour nos concitoyens. I1 débuta à Oran avec le grade de sous-lieutenant d'artillerie en 1923. En 1925, il fit la campagne du Rif et sa brillante conduite lui valut d'être plusieurs fois cité.

En 1928, il passa dans la gendarmerie et fut lieutenant à Bougie, capitaine à Mascara. Détaché à l a Ve région aérienne, c'est lui qui créa la gendarmerie de l'air. En 1944, au moment de la Libération, il partit pour Paris et servit au ministère de l'air jusqu'au mois d'octobre 1948 où, de retour à Alger, il prit le commandement de la Xe légion de gendarmerie.

En août 1951, le commandement des forces de gendarmerie de la Xe région militaire lui était confié et il était promu général de brigade.

Le général Morin avait été promu officier de la Légion d'honneur le 4 novembre 1948. Nous sommes heureux d'adresser au récipiendaire nos félicitations les plus cordiales.

9 décembre 1955
Poursuivant ses visites dans toute l'Algérie - Le général Morin a inspecté  la gendarmerie mobile d'Oran - Poursuivant inlassablement ses visites dans toute l'Algérie, le général Morin, commandant  la gendarmerie nationale de la 10e région militaire, a inspecté la gendarmerie mobile à Oran au cours d'une prise d'armes qui s'est déroulée dans la caserne Ehrmann à Saint-Hubert.

Accueilli par le chef d'escadron, le général Morin a passé en revue les escadrons de nouvelle formation.

Cet officier général a remarqué la brillante tenue et l'excellente présentation des gendarmes auxiliaires qui appartiennent à la première réserve et constituent en partie les nouvelles unités. En outre, il s'est intéressé à l’organisation matérielle de ces dernières : confort, couchage, alimentation et a constaté que le maximum d'efforts avaient réalisés dans ce domaine.

Après avoir rassemblé les réservistes dans la vaste salle à manger aux installations modernes, le général Morin leur a souhaité la bienvenue. I1 leur a fait comprendre que les plus hautes autorités n'ignoraient pas le sacrifice consenti par tous et qui, pour certains d'entre eux, entraîne des difficultés d'ordre familial ou professionnel. I1 s'est penché, avec la plus grande bienveillance, sur la situation personnelle de plusieurs d'entre eux.

C'est à la suite d'une inévitable période d'adaptation que ces militaires, mélangés aux gendarmes d'active, formeront un bloc homogène dans chacun des escadrons prêts à répondre à toutes les missions qui leur seront confiées dans le cadre du rétablissement ou du maintien de l'ordre.

Réservistes Français de souche et Français-Musulmans ont déjà à cœur de remplir leur tâche avec honneur, là est bien l’hommage qu’ils tiennent à rendre à la grenade figurant sur leurs écussons, symbole de loyauté, de fidélité et de courage.

Profitant de son passage à la caserne Ehrmann le général Morin a assisté aux séances d'instruction des deux stages d'élèves-gendarmes encadrés par un personnel d'élite. Recrutés en Métropole, ces jeunes gens subissent une formation professionnelle accélérée pendant leur stage d'une durée de sept mois. C'est à l'issue de celui-ci que les élèves obtiennent la qualité de gendarme, après la prestation de serment et le certificat interarmes.

Ensuite, ces nouveaux gendarmes sont aussitôt répartis dans les brigades  de gendarmerie de nouvelles formations dont notre Algérie a tant besoin pour sa sauvegarde et la tranquillité de sa population.

Le général Morin a poursuivi sa tournée d'inspection dans le département d'Oran pour se rendre compte sur place de l'état d'avancement des futures casernes de gendarmerie objet du nouveau plan d'implantation.

27 juillet 1957
Dans la gendarmerie nationale, le général  Morin est nommé général de division.

22 avril 1960
Au cours d’une belle prise d’armes à l a caserne Saint-Hubert d’Oran, le général de division Morin a fait ses adieux à la gendarmerie d’Oranie.

Au terme d’une longue et belle carrière de soldat, en grande partie consacrée au maintien de l’ordre, le général de division Morin, commandant la gendarmerie de la Xe région militaire, va passer dans la deuxième section d’état-major. Ce qui indique, en termes non officiels, que ce chef encore jeune physiquement et dynamique, est atteint par l’inexorable limite d’âge et qu’il va quitter la foule innombrable de ses subordonnés, dont il s‘était acquis un respect admiratif.

F i l s de notre Oranie - tout comme le général Jouhaud - le général Morin devait ressentir une émotion particulière hier matin en passant sa revue d’adieux dans la cour de la gendarmerie mobile. En effet, achever comme général de division, à Saint-Hubert, une carrière commencée comme canonnier de deuxième classe à la caserne d’Eckmuhl, voilà bien un extraordinaire exploit qui est aussi une combien douce satisfaction...

Au début de la matinée, à 9 heures, le commandant de la gendarmerie de la Xe région, fleurissait en toute simplicité la plaque de marbre apposée sous le porche de la caserne du square Garbé, où sont gravés les noms des gendarmes d‘Oranie tombés au champ d’honneur.

Puis, à 11 heures, il était accueilli aux portes de la caserne de la gendarmerie mobile, où le recevaient les colonels Fillon et chandelier, entourés des officiers supérieurs, leurs adjoints.

Alignés impeccablement et formant un vaste rectangle, toutes les unités des deux gendarmeries stationnées en Oranie, étaient représentées. C’est ainsi que l’on remarquait, avec l‘excellente musique du 2e R.T., deux pelotons de gendarmerie, neuf  pelotons de gendarmerie mobile dont un de gendarmes auxiliaires et un du centre d‘instruction d’Oued Sarno ; une section de motocyclistes d‘allure impressionnante avec leurs brandebourgs blancs et leurs basques écarlates. Les retraités de la gendarmerie étaient également présents, avec leur drapeau, autour du président Serra.

Après avoir salué le poste de garde qui présentait les armes, le général Morin déposa une gerbe au pied de la stèle à la mémoire des gendarmes mobiles tombés au champ d’honneur, puis observa une minute de recueillement tandis que clairons et tambours sonnaient « Aux Morts ».

Remise de décorations et défilé.

Le général Morin, apes avoir écouté l’hymne national, passa lentement sur le front des troupes, saluant au passage les divers fanions et les chefs de détachements. Puis il procéda, selon le cérémonial consacré, à la remise des décorations :

Légion d’honneur : capitaine Kremer.

Médaille militaire : Adjudant Billaud (Tlemcen) ; M.d.l.-chef Rouillon (Arzew) ; gendarmes Basso (Saïda), Gamelin (Frenda), Gimie (Aïn-Farès), Lastenet (Tlemcen), Pruja (Oran), Vernet (EI-Ançor) ; M.d.1.-chef Bonte, esc. 5/10 bis détaché au 13/10 bis ; Rois, esc. 4/10 bis ;  Sauvez, esc. 2/10 bis ; Tal, E.M. 2e groupe. Gendarmes Albertini, esc. 5/10 bis; Derri, esc. 6/10 bis ; Houfbine, esc. 1/10 bis ; Raffaelli, esc. 3/10 bis ; Troubat, esc. hors-rang.

Croix de la valeur militaire : Adjudant-chef JULien (Oran).

Gendarmes Alarcon (Arzew) ; Ameur (Saïda) ; Guinero (Tlélat) ; Lamner (Tiaret) ; Ruvira (Mostaganem). Lieutenant Mion, esc. 1/10 bis. Gendarmes Gascoin, esc. 4/10 bis ; Ichanson, esc. 6/10 bis ; Lemaire, esc. 3/10 bis ; Mathieu, esc. 5/10 bis ; Pacaud, esc. 2/10 bis. Gendarme auxiliaire Valéro, esc. 13/10 bis.

Ce fut ensuite le traditionnel défilé aux accents d'une marche entraînante. Parade qui permit d'apprécier l'excellente tenue et l'allure souple et sportive des soldats d'élite de nos deux gendarmeries.

Un vin d’honneur, servi dans la salle du foyer, devait permettre, dans une atmosphère de détente, de manifester au général Morin les regrets profonds et sincères que provoquent son départ, regrets partagés, nous en sommes certains, par toutes nos populations d'Oranie.

20 juillet 1960
Le général Morin, grand-officier de la Légion d'honneur.

Ainsi que nous l'avons déjà signalé, le conseil des Ministres du 13 juillet a élevé à la dignité de grand-officier de la Légion d’honneur, le général de division Camille Morin. Nous sommes particulièrement heureux de

présenter au général Morin, fils d'Oranais puisque né à Aboukir et issu d'une famille de Noisy-les-Bains (Mostaganem), nos vives et très sincères félicitations pour la haute distinction qui vient rendre un nouvel hommage aux éminents services qu'il a rendus.

Et pour citer assez brièvement ces derniers, il suffira de rappeler le texte de 1'ordre du jour du général Crépin, commandant en chef des forces en Algérie, lors du départ du général Morin, atteint par la limite d'âge.

Le général de division Morin quitte l'armée, au terme de 40 années de services, dont 29 passées en Algérie.

Après de brillants débuts d'artilleur dans le R i f f , il entre, en 1927, dans la gendarmerie, et profondément attaché à cette terre où il est né, entame une carrière qui sera presque exclusivement consacrée à l'Algérie, mis à part le commandement de la 1ère Légion ter de la garde républicaine exercée à paris, de 1947 à 1948, avec le grade de colonel.

En cette année, il prend la tête de la Xe Légion de gendarmerie qui, à l'époque, couvre tout le territoire algérien.

C'est à ce poste puis, à partir du 1er mai 1951, à celui de commandant des légions de gendarmerie et de la garde républicaine d'Algérie, que cet officier, élevé au grade de général de brigade le 28 décembre 1951 et de général de division, le 1er août 1957, peut donner sa mesure.

L'accroissement des effectifs de la gendarmerie (de 1955 à 1960, 199 brigades, 37 compagnies, 7 groupements ont été créés et 148 casernes construites), leur réorganisation ont constitué une vaste entreprise que le général Morin a conduite avec une lucidité pénétrante et une foi rayonnante.

Faisant face à la rébellion sans discontinuer depuis ses premières manifestations, cet officier général, cité deux fois durant cette période, et objet de quatre témoignages de satisfaction écrits de la part de ses chefs, a su obtenir, par son impulsion ferme et bienveillante, que la gendarmerie témoigne de sa valeur morale traditionnelle dans l'accomplissement de sa double mission de maintien de l'ordre et de pacification,

Aussi, au moment où il s'éloigne de cette terre algérienne qu'il a tant défendue, que le général Morin sache que notre souvenir et nos vœux l’accompagnent.

* * *

Pour finir, notons que Noisy-les-Bains avait honoré cet enfant du pays en inaugurant une « Rue Général Morin ».

Gérard LANGLOIS

§

(Sources : Le général Jean-Pierre Morin, que nous remercion, pour la biographie de son père, spécialement rédigée en 2000 pour notre site « Noisy-les-Bains, village français d'Algérie », ainsi que pour le portrait qui illustre cette page ; La Gazette de Noisy-les-Bains pour les articles de presse ; Gérard Langlois pour la généalogie.)

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